Récoltes intéressantes
de l'hiver 2000-2001
par Paul
HERTZOG
Un passé encore récent nous avait habitué à des
hivers plus rigoureux, plus précoces, et d’une manière générale les
premiers froids de novembre sonnaient le glas de la saison mycologique ;
les aires de prospection étaient abandonnées à quelques (très rares !)
polyporistes. Très exceptionnellement les poussées fongiques se prolongeaient,
comme en 1998, jusqu’à la fin décembre.
L’hiver 2000/2001 particulièrement clément, avec
des températures et des précipitations inhabituelles, explique le nombre
d’espèces remarquables récoltées durant cette période : récoltes
rares pour la plupart nouvelles pour l’Alsace, que nous devons, une fois de
plus, aux sorties répétées de D. Doll, infatigable et plus enthousiaste que
jamais.
Panellus ringens Fr.
et Panellus violaceofulvus
(Batsch : Fr.) Sing.
Rares sont les mycologues qui ont eu la chance de voir côte à côte sur une même
table P. ringens et P.
violaceofulvus.
Le premier semble lié à l’aune et au bouleau, le second aux conifères. Ce
sont des champignons à chapeau résupiné, plus ou moins cupulaire, de petite
taille (1 à 2 cm), à couleurs brun carné (quelquefois plus violacé vineux
pour violaceofulvus), à lames
subconcolores. Macroscopiquement peu de chose sépare ces 2 taxons, si ce
n’est une teinte plus appuyée pour violaceofulvus
et un chapeau strié pour ringens. Le
support et la microscopie permettent de trancher : spores < 7 µ pour ringens,
7 à 10 µ pour violaceofulvus.
Récoltes :
- P. violaceofulvus, Osenbuhr, bois
d’épicéa.
- P. ringens, Wasserbourg, Soultzbach,
toujours sur aune.
P. Laurent avait déjà
cette rare espèce (Etang du Devin, Lapoutroie).
Ciboria amentacea (Balbis :
Fr.) Fuck.
Ce gracieux discomycète stipité, de couleur brun
rougeâtre et blanc feutré à l’extérieur, atteint difficilement 1 cm. Sa
croissance sur chatons d’aune permet une identification rapide.
L’espèce n’est probablement pas rare du tout, encore faut-il aller
prospecter dans ses stations en période hivernale ou au tout premier printemps.
Récoltes : Zimmerbach, Turckheim.
Ciboria
ressemblants : C. batschiana sur
gland, C. alni sur strobile d’aune.
Pezizella alniella (Nyl.) Dennis
Encore une espèce liée à l’aune. Les apothécies
atteignent difficilement 1 mm et sont courtement stipitées. Leur couleur crème
tranche sur le support foncé que constituent les strobiles de l’aune. On peut
observer des dizaines de fructifications sur 1 seul fruit.
Récoltes : Soultzbach, Stosswihr. Dét. P. Laurent.
L’espèce est maintenant appelée Calycina alniella
(Nyl.) Baral (cf. la révision par René Dougoud de la taxonomie
des Discomycètes contenus dans le tome 1 des « Champignons de
Suisse » in D.M. 117/118)
Baeospora myriadophylla (Peck) Sing.
« Lilablättriges tausendblatt » est le
nom allemand très évocateur de ce champignon :
-
habitus de Baeospora, en moins élancéµ
-
lames très serrées, lilacines
-
sur bois pourri d’épicea
Voilà qui permet une identification rapide. Chez les
basidiomes jeunes et frais, la couleur lilacine des lames tranche avec le
chapeau grisâtre ocré. Par la suite les teintes violacées s’estompent
jusqu’à disparaître totalement.
Récoltes : Stosswihr, février 2001.
Lors des Rencontres SMS de Courtavon en 1991, M. Wilhelm nous avait présenté
ce champignon hors période hivernale.
Tremella globospora
Reid
Ce champignon n’est « visible »
qu’en période humide. Il forme alors des espèces de tubercules gélatineux
de quelques mm de large sur son support. La surface hyméniale est blanchâtre,
opalescente. Par le sec ces tubercules disparaissent très vite et ne forment
plus que quelques vagues plaquettes difficilement repérables.
Donné comme rare. Cf. Tome 2 des « Champignons de Suisse »
Récoltes : Gauchmatt, Gueberschwihr, mars 2001.
Resupinatus kavinii (Pilat) Moser
Les petits chapeaux campanulés, brun grisâtre,
mesurant 2 mm de diamètre en moyenne sont fixés par le dos à leur support.
Les lamelles grisâtres tranchent à peine.
L’absence totale de cystides métuloïdes et les spores sphériques de 4 à 5
µ sont propres à ce taxon. Certains auteurs traitent R.
kavinii en forme de R. applicatus,
à spores un peu plus grandes et non rigoureusement globuleuses.
Récolte : Wasserbourg, mars 2001
Resupinatus cyphelliformis (Berk.) Sing.
Pour la détermination de cette espèce nous avons
suivi Moser (KKF p. 153). Les chapeaux gris foncé, un peu farineux floconneux,
cyphelloïdes (en forme de cornet), atteignaient le demi-cm. Les lames grisâtres
dans le fond apparaissaient nettement plus pâles, blanchâtres vers l’arête.
Les spores réniformes mesuraient 7-9 µ sur 3,5-4 µ.
Pas de cystides métuloïdes observées.
Récolte : Wassebourg, février 2001.
Une deuxième récolte (Osenbuhr, février 2001)
accusait quelques différences :
-
sporophores en forme de coupe arrondie, non cyphelliforme, gris ardoise
-
lamelles concolores
-
spores réniformes 8-9 µ sur 4 µ
-
présence de cystides métuloïdes, légèrement dextrinoïdes
Nous avons pensé à Hohenbuehelia chevallieri
(Pat.) Pegl. Et la photo de n° 2804 de Cetto convenait bien. Mais nos
mensurations sporales restaient en deçà et les cystides trop peu évidentes !
(Les dernières révisions des resupinateae versent R.
cyphelliformis dans le genre Hohenbuehelia…)
Il est probable que les récoltes précitées doivent être attribuées à
Hohenbuehelia cyphelliformis (Berk.) O.K.Miller
De nouvelles récoltes et des examens approfondis
apporteront sans doute plus de précisions.
Hohenbuehelia fluxilis (Fr.) Orton
Encore une petite espèce pleurotoïde à structure gélifiée,
bien caractérisée quant à elle par ses basides bisporiques. Les basidiophores
flabelliformes à réniformes, gris foncé, pâlissant, poussaient sur
branchettes de saule et mesuraient de 0,5 à 1,5 cm. A noter également des
lames espacées (7-12 grandes lames), un pseudostipe tomenteux-hispide et la
chair au goût farineux. Spores de 8-10,5 µ sur 4-5 µ. Cystides métuloïdes
nombreuses.
Ce champignon a été récolté sur les hauteurs de Wihr-au-Val à la sortie de
l’hiver.
Exidia umbrinella Bres.
Cette petite plante développe des fructifications en
forme de boutons plus ou moins pezizoïdes et substipités en colonies, non
confluentes. Les basidiophores de 0,5 à 1,5 mmm sont gélatineux, fermes, un
peu scabres, brunâtres à ambrés et foncent sur le sec.
Bollenberg, sur branchette de pin. Début mars 2001.
Collybia nivalis (Luthi &
Plomb) Moser
Le seul échantillon soumis à notre examen présentait une vague ressemblance
avec C. dryophila. Il s’en éloignait
manifestement par son chapeau hygrophane brun roussâtre terne, par ses lames
brun ocre grisâtre et son stipe roux à base hirsute.
La planche de
Luthi (BSMF T. 83) donne une bonne représentation de ce taxon dont c’est la
première récolte en Alsace, à notre connaissance.
C. nivalis
pousse à la fin de l’hiver, plutôt en montagne (cf. « Champignons de
Suisse » Tome 3 Pl. 197).
Sous chênes, au dessus de Ribeauvillé, février
2001.
Deus espèces plus ou moins ressemblantes (C.
fuscopurpurea et C. hybrida) sont automnales ou n’ont pas de stipe à base
strigueuse
Entoloma opacum (Kalchbr.)
Noordel.
Cette récolte (leg. et dét. D. Schott) complète très heureusement la liste
des espèces hivernales 2000/2001.
On trouvera par ailleurs, sous la plume de Dominique précisions et commentaires
sur cette première régionale.
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