Fiche technique régionale: Russula vinosa Lindblad

par Paul HERTZOG

Photo © Claude Lejeune

Description sommaire :

Chapeau : 5-12 cm, hémisphérique, ferme, puis étalé déprimé au centre, marge un peu cannelée ; surface plutôt mate, plus brillante par la pluie, marge souvent pruineuse ; teintes variant du brun vineux, pourpre vineux au rose lilacin à la marge, avec aussi des plages ocracées.
Lamelles : d’abord assez serrées, puis s’espaçant, crème ocre, cassantes ; arêtes noircissantes sur le tard ou par temps sec ; sporée ocre clair.
Stipe : 3-7 cm sur 1-2 cm, blanc, quelquefois nettement lavé de rose, grisonnant.
Chair : douce, blanche, grisonnant puis noircissant au grattage (rougissement préalable possible).
Habitat : conifères subhygrophiles, tourbières, mais également dans les stations plus sèches. Juillet à septembre.

Microscopie : Spores 8-11/6-8 µ, légèrement ovoïdes, finement spinuleuses. Epicutis à poils égaux x 3-4 µ. Hyphes primordiales à incrustations grossières après traitement à la fushine.

Récoltes alsaciennes et commentaires :

Haut-Rhin :
Côte 1000, sous conifères humides (épicéas).
Lac Noir, sous épicéas subhygrophiles.
2 récoltes de D.Doll, sous pins, en terrain plus sec à Labaroche.
M.Wilhelm la signale aux Trois-Epis.

Bas-Rhin :
Peu de récoltes connues ; signalée dans l’inventaire SMS sans précision.
« Oublié » sur une table de détermination à l’expo 2000 à Molsheim ; emportée et déterminée par C.Lejeune.
J.Trendel nous a signalé 2 stations, la tourbière de Welschkobert, et la Forêt de Haguenau (sud) sous pins, dans la mousse.

En résumé une espèce liée aux conifères, bien implantée mais peu commune, non strictement montagnarde (mais il est vrai que la Forêt de Haguenau est plantée sur alluvions vosgiennes !). Il reste très certainement des stations à découvrir dans le massif vosgien.

Russula vinosa est pratiquement présente tous les ans dans sa station du Lac Noir (fin juillet – début août). En période optimale cette russule frappe par sa beauté : couleur pourprée, marge d’un rose vineux mat très particulier, stipe lavé de rose… Sous cette livrée c’est assurément un très beau champignon et l’on revient volontiers dans ces lieux pour le plaisir de le retrouver. Il est vrai que le stipe lavé de rose est rarement signalé et nous n’avons pas observé ce détail sur les récoltes suivantes.

Dans la station très humide de la Côte 1000 nous n’avons relevé qu’une seule récolte en août 1990 sous épicéas. Quant aux collections de D.Doll (juillet 2001) elles proviennent toutes de forêts bien plus sèches.

Sur exemplaires jeunes ou frais il est parfois difficile de déceler un quelconque noircissement si ce n’est un subtil grisonnement dans les « mangeurs » de bêtes, ou quelque arête un peu piquetée de noir au bord du chapeau. A.Einhellinger (Die Gattung Russula in Bayern) cite J.Schaeffer :

« La base du stipe ou mieux la semelle (Stielsohle) au contact avec le mycélium est très souvent et dès le jeune âge, parcourue de veinules noirâtres, bien avant l’amorce du grisonnement ».

Nous n’avons pu confirmer cette observation sur la récolte de 2001 du Lac Noir (non contrôlé sur les autres collections).
Le test du grattage nous paraît plus fiable (grisonnement après quelques minutes ou plus…).

Confusions possibles : Russula paludosa et Russula decolorans plus ou poins grisonnantes viennent dans les mêmes milieux, mais leurs teintes sont plus rouges ou orangées. Russula integra, dont certaines formes accusent des couleurs pourprées, ne grisonne pas et sa sporée est plus jaune.

F.Sarraillon a récolté, dans le secteur de Labaroche, une forme de Russula olivacea dont les nuances rose vineux rappelaient étrangement celles de R. vinosa ; le stipe rose ajoutait à la confusion.

Et en dehors de l’Alsace ? :
A. Laisné la signale en Forêt Noire tout comme A.Marchand dont la photo (482) représente des exemplaires trouvés dans la région d’Emmendingen sous épicéas.
Stations nombreuses, répandues du nord au sud en Forêt Noire d’après G.Kriegelsteiner.
R.Courtecuisse dans sa fiche d’inventaire national (en cours de préparation) la signale dans les départements du Doubs, des Vosges, de l’Isère, de la Corse (d’autres récoltes demandent confirmation). L’altitude signalée varie de 850 à 2000 m. H.Romagnesi la considérait comme absente en plaine mais les récoltes de J.Trendel (200 m. environ) apportent un démenti à cette affirmation.

Bibliographie :

BON, M., 1992, Champignons d’Europe occidentale, p. 64-65
COURTECUISSE, R., DUHEM, B., 1994, Guide des champignons de France et d’Europe, pl. 1502
DÄHNCKE, R-M., 1993, 1200 Pilze in Farbfotos, pl. 854.
EINHELLINGER, A., 1985, Die Gattung Russula in Bayern, p. 195.
GALLI, R., Le Russule, p. 390-391.
KRIEGELSTEINER, G., Verbreitungsatlas der Grosspilze Deutschlands, Band 1 Ständerpilze Teil A Nichtblätterpilze, pl. 1043.
MARCHAND, A., 1977, Champignons du Nord et du Midi, Tome 5, pl. 482.
ROMAGNESI, H., 1967, Les Russules, p. 735-736.