Société Mycologique de Strasbourg |
Etude du genre Scutellinia
Quand S. scutellata et S. armatospora ne sont pas celles que lon croyait. par Bernard CROZES Pendant longtemps et je nétais pas le seul à la SMS jai baptisé tous les petits discomycètes rouges frangés de poils bruns Scutellinia scutellata. Faute de littérature suffisante à lépoque, il nétait même pas question de passer ces champignons au micro. Cest Jean-Michel Trendel qui ma dit un jour quil y avait tout un groupe très difficile à débrouiller et que le microscope était indispensable. La parution de louvrage suisse de Breitenbach et Kränzlin sur les Ascomycètes apporta une première ouverture sur ce genre avec la description de 5 espèces de Scutellinia. Une espèce avait les spores rondes, les autres elliptiques ; des différences notables apparaissaient au niveau des poils et de lornementation des spores . Cest ainsi que lors des Journées Mycologiques de la SMS à Lucelle, Claude Lejeune et Roland Wiest déterminèrent Scutellinia armatospora pour la première fois. Depuis jai revu plusieurs fois cette espèce lors de divers congrès mais je ne lavais jamais encore formellement identifiée. Loccasion se présenta le 24/06/99 lors de la sortie organisée par les Laisné à lElmerforst. Je revois encore le microscope installé en plein air sur une terrasse ombragée et les gens défiler devant lobjectif pour comparer les spores rondes et verruqueuses avec celles de la planche des suisses. Mais était-ce bien S. armatospora ? Le nom navait-il pas changé ? Jen avais déjà le pressentiment au travers de certaines lectures darticles quand une question lancée sur le web (forum inventaire-myco) par François Valade (que je remercie ici pour la documentation quil ma fournie) relança le débat et permit à des confrères déclairer ma lanterne (merci également à Jean-Claude Malaval, Albert Pericouche et surtout à Jean-Paul Priou qui a bien voulu relire mon texte). Cest ainsi que S. armatospora Denison (et non Dension comme écrit dans les suisses) est redevenue S. trechispora (B. & Br.) Lamb. Lerreur serait due à Denison qui naurait pas contribué à clarifier létude de ce genre. Pour une fois ce nest pas la faute à Rousseau. Mais le S. scutellata décrit par les suisses est-il le véritable scutellata ? Les travaux de Mme Le Gal ont permis de distinguer un scutellata type et une variété cervorum (ainsi quune forme terrigena). Depuis dautres travaux ont permis de rebaptiser tout çà et la variété cervorum, qui est en fait beaucoup plus fréquente que le type, est devenue S. crinita . A noter quil existe aussi une S. citrina. Je vais tenter de faire une synthèse de mes recherches bibliographiques sur le sujet en essayant de rester simple et accessible pour le plus grand nombre. Après quelques généralités sur le genre Scutellinia, jévoquerai la multitude despèces qui le composent et je présenterai une clé simplifiée ne comprenant que les principales espèces susceptibles dêtre rencontrées dans nos régions.
1 Le genre Scutellinia Le genre Scutellinia a été étudié par de nombreux mycologues parmi lesquels on peut citer Denison (1959), Mme Le Gal (1966), Svrcek (1971), Moravec (1974), Donadini (1983), Schumacher (1990), Yao et Spooner (1995). Placé au sein des Ascomycotina : ordre des Pezizales, famille des Pyronemataceae dans la conception actuelle de la classification. Le type est Scutellinia scutellata (Linné : Fries) Lambotte. 11 Caractéristiques du genre On reconnaît facilement une Scutellinia par :
12 Habitat et poussée Les espèces du genre Scutellinia sont saprophytes. On les trouve :
Daprès Donadini on arrive à trouver des Scutellinia presque toute lannée et en plaine (dans le Midi) les espèces à spores globuleuses apparaissent avant celles à spores ellipsoïdales ; ce nest pas vérifié en montagne où la durée de la poussée est plus courte. 13 Eléments à prendre en compte pour la détermination Daprès Schumacher, il faut tenir comte de :
Létudes des poils est donc très importante mais il importe dobserver des poils matures et entiers, choisis parmi ceux de la marge (les plus longs). Les poils se cassent facilement et il est conseillé de coller les exsicatas dans des boîtes. La taille des spores est également intéressante dans certains cas. Le critère de la couleur est moins important car les pigments caroténoïdes sont très dégradables soit du fait de la sècheresse, soit sous leffet de la lumière, soit par une oxydation en milieu humide. Etudier si possible des exemplaires frais juste parvenus à maturité.
2 Inventaire des espèces Je rappelle que les suisses présentent 5 espèces (armatospora, cejpii, kerguelensis, scutellata et umbrarum). On a vu que armatospora devait sappeler trechispora. Mme Le Gal en distinguait une trentaine au travers des 3 études quelle a publié sur le sujet dans le bulletin de la SMF. Scumacher reconnaît 46 espèces dans sa clé alors que la littérature est encombrée de nombreux épithètes (271 toujours daprès Schumacher). Donadini distingue, quant à lui, de nombreuses formes et variétés, notamment dans la section des Trechisporeae qui ne sont pas reconnues par tout le monde. A titre anecdotique, voici deux exemples où Schumacher reconnaît 3 espèces alors que Donadini en voit 10 avec des formes et des variétés :
S. barlae = S. barlae, fo. aurantiaca S. paludicola = S. barlae fo. paludicola
3 Essai de clé des principales Scutellinia (daprès Schumacher et Priou) 31 Ascospores globuleuses
- verruqueuses à protubérances hautes et tronquées, > 2 µ et longs poils marginaux > 1000 µ. S. trechispora - verruqueuses à protubérances basses et arrondies < 2 µ et poils courts < 500 µ, plutôt montagnard S. barlae 32 Ascospores subglobuleuses
33 Ascospores ellipsoïdales Ce groupe est très difficile à traiter sous forme de clé ; les auteurs distinguent des spores largement ellipsoïdales et étroitement ellipsoïdales avec tous les intermédiaires que cela suppose. Je me contenterai de donner quelques points de repères portant sur lornementation des spores et leurs dimensions ainsi que celles des poils.
Commentaires : Cette clé nen a que le nom car elle ne présente pas les dichotomies habituelles ; cela maurait entraîné trop loin et mes compétences sont encore insuffisantes. S. trechispora (rappel, = S. armatospora) S. citrina : nouveau nom de S. paludicola S. umbrorum : à noter que les Suisses ont écrit S. umbrarum ce qui nest plus dactualité S. crinita (rappel, = S. scutellata var. cervorum) ; A noter que cette espèce, bien étudiée par Mme Le Gal et rebaptisée par Schumacher, nest pas reconnue par les anglais Yao et Spooner. Courtecuisse et Priou la disent plus fréquente que S. scutellata type et la considèrent comme une espèce parfaitement valable. A noter : daprès la clé de Schumacher, si ascospores de grande taille 21,1-27,4 x 13,6-16,4 µ il sagit probablement de S. pilati S. cejpii : Schumacher ne retient pas S. hirta donné parfois comme synonyme car nomem ambiguum daprès lui, alors que Yao et Spooner conservent lépithète. S. kerguelensis : le nom vient des îles du même nom doù provenaient les exemplaires étudiés mais lespèce existait en France sous un autre nom invalidé depuis et on peut la trouver dans les lieux très humides au bord des ruisseaux. Je précise que le Schumacher cité maintes fois dans larticle a Trond pour prénom et quil y a dans la littérature un autre mycologue du nom de Schumacher, Heinrich Christian Friedrich, grand mycologue du siècle dernier (1757-1830) responsable de nombreux taxons. On retrouve sa trace dans S. hirta (Schum. :Fr.)Kuntze. Daprès les spécialistes que jai consultés : - les plus fréquentes sont : S.trechispora et S.
crinita. Bibliographie : BREINTENBACH, J., KRANZLIN, F., 1981
Champignons de Suisse tome 1, Ed. Mykologia, p. 96-99
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